Samedi 8 mars 2025
Pour la 30ème édition des nuits de la Chouette de la LPO, on avait décidé de frapper fort… C’est pas qu’on en a marre des Hulottes et des Chevêches… (non non…on les adore !) Mais quand même ! 30 ans, il fallait proposer du lourd… Allez, direction les Alpilles, royaume du Grand Duc. J’étais venu en repérage dans les semaines qui avaient précédé et j’avais donné RDV au seigneur des lieux… nous fera-t-il encore l’honneur de sa présence ce soir, alors que nous sommes déjà un peu tard en saison… Mystère !

Nous sommes presque 25 apprentis Ornithos, au rdv, devant le camping à Maussane… c’est beaucoup. On va donc essayer d’être le plus discret possible. Après l’organisation du covoiturage, pas de bol, au moment de partir, l’un des véhicules est à plat (sic!)… mais il en faut plus pour entamer notre motivation,… après une réparation menée tambour battant par le chauffeur, on se retrouve tous à quelques kilomètres de là : au parking des Caisses de Jean Jean (je ne sais pas si vous connaissez cet endroit, mais si ce n’est pas le cas, courez-y, c’est absolument magique !).
Au départ, distribution de jumelles et petit briefing ornitho… on reéxplique les infos de base sur les chouettes et les hiboux, que l’on peut voir en Provence et en France (9!) (ça tombe bien la LPO vient de publier une synthèse très complète sur les Rapaces Nocturnes ainsi qu’une autre étude sur le recensements des Chevêches dans le Sud-Est auquel le Groupe à participer les années passées) … On en profite aussi pour faire un peu de pédagogie : « non les Chouettes ne sont pas les femelles des Hiboux » (mais là, j’exagère car tout le monde le savait évidemment !) et non, on ne les cloue plus aux portes des granges pour conjurer le mauvais sort (Oui on a progressé quand même ! Même s’il reste encore du boulot). Bref, nous voilà partis à la queue-le-leu entre le canal des Baux et le bien-nommé rocher du Pas du loup… Il fait assez doux, il y a un petit vent de Sud, qui n’est pas de très bon augure pour l’évolution de la météo du WE.. bref, il va pleuvoir bientôt, mais ce soir, toutes les conditions sont réunies pour passer une belle soirée d’écoute… Nous progressons lentement. Tout le monde chemine et parle doucement… Au pied du premier épéron rocheux, un épervier passe devant nous entre les oliviers puis s’élève en larges cercles réguliers. On a bien l’occasion de l’observer. C’est un mâle adulte ; on voit bien ses stries rousses sous les ailes … tout le monde en profite. Au loin, un vol impressionnant de Choucas se fait entendre et beaucoup de pinsons s’égayent dans les hautes branches des peupliers…C’est calme, nous progressons encore…, quelques fauvettes mélanocéphales alertent et chantent sur notre passage, ainsi que quelques merles au loin. Le chemin est bordé de petits narcisses sauvages blancs. Bref, un bel endroit.
La lumière décline… c’est bientôt l’heure. Nous arrivons pile-poil à l’endroit voulu entre les reliefs, cachés derrière une haie de genêts et nous plantons les longues vues… et bien sûr nous ouvrons grandes nos oreilles… 5 mn, 10 mn… tout le monde est silencieux et aux aguets…

…et tout à coup : un « Hooouuuu » long, sourd et pénêtrant brise le silence. C’est un mâle de Grand Duc. Alors que nous l’attendions sur le relief Nord, il est posé sur le relief derrière nous, sur une longue arrête rocheuse qui ferme les Caisses de Jean Jean… Nous scrutons les pierres et les rochers avec les longue-vues et parvenons assez vite à le localiser. Tout le monde à l’occasion de le voir et le détailler dans les lunettes… il bouge un peu sur sa corniche, on voit bien ses 2 aigrettes… c’est magique… 5 minutes… 10 minutes à chanter et le voilà qui s’envole… Oups déjà disparu !… Il est presque 18h45, on se rend compte que la nuit est tombée… Il est temps de repartir doucement en marche arrière… le Grand Duc, probablement le même (?) s’est reposé un peu plus loin sur la crête que nous longeons. Il nous accompagne de ses appels sourds toutes les 15 s … mais bientôt, il est couvert par les rainettes qui s’en donnent à cœur joie dans le ruisseau (apparemment ici, on appelle ça, un « gaudre ») qui s’écoule le long du chemin. Bref, j’ai l’impression qu’il nous dit au revoir et qu’il est l’heure pour lui de partir en chasse, car il fait bien noir maintenant,
Heureusement, la lune s’est levée. Le premier quartier nous éclaire et allonge nos ombres sur le chemin… après un petit quart d’heure, nous retrouvons les voitures… Tout le monde est là, on se salue. J’ai l’impression que tout le monde a la banane. Il est l’heure de rentrer, nous cheminons doucement vers Maussane, traversons St-Rémy, puis regagnons Avignon… A la radio, on entend que les Français ont mis une déculoté aux Irlandais dans le tournoi des 6 nations… On écoute Annie raconter son dernier voyage au Laos et au Cambodge…Je crois qu’il est temps d’aller boire une bière pour fêter tout ça !
Sébastien FEUTRY