Les naturalistes sont d'une espèce rare, a fortiori en Haute Provence. La perte de l'un d'entre eux est forcément un drame. Un drame pour sa famille, pour ses amis, pour la communauté naturaliste, pour la protection de la Nature. Michel ROUX était un naturaliste. Il avait 49 ans. Il vivait seul sa passion, sa passion le faisait vivre. Ce 4 janvier 2012, une embolie pulmonaire a mis subitement fin à ce parcours singulier. Il repose au cimetière Fenestrelle d'Aubagne.
Rares sont les ornithologues qui ont consacré leur vie à tant aimer les oiseaux en conciliant précision des observations, émerveillement par l’écoute de la nature et bonté pour les autres. Depuis le plateau de Valensole, en passant par tous les pays du monde, il aura marqué de nombreuses personnes. Il était d'une simplicité déconcertante, d'une candeur et d'une gentillesse irrésistible.
Passion d'observer la nature jusqu'à s'y perdre. Et plaisir de partager ses connaissances, bonheur de pouvoir faire profiter les autres, en toute humilité, de son exceptionnelle acuité auditive. Combien d’ornithologues d’aujourd’hui ont fait leurs premiers pas avec lui ? Combien d’oreilles a-t-il initiées au langage des oiseaux ? Facétieux imitateur des chants d’oiseaux, lors des sorties, il trompait parfois tout son monde. Toujours à la recherche d’oiseaux nouveaux, sa voiture en guise de maison, il partait au gré de ses envies dans d’autres régions de France ou d’ailleurs.
La LPO PACA porte le deuil de cet ami fidèle. Vous pourrez parcourir les témoignages des amis de Michel :
Comme le dit Brigitte : - "Nous avons passé de très bon moments en sa compagnie et il nous a beaucoup appris sur les chants d'oiseaux car il avait une oreille extraordinaire et il aimait partager sa passion. Inspiré par Géroudet il avait commencé à écrire des notes sur ses observations... On ne l'oubliera pas !"
Nos collègues algériens ont tenu à réagir à son décès :
Faiçal HASSANI : - "C'est avec une grande émotion que j’ai appris le décès de notre ami Michel, l’ornithologue le plus calme que j’ai rencontré".
Mohamed MESTARI nous raconte : - "On a reconnu ensemble des espèces en vol, nous n’étions pas d'accord sur la pie grièche grise… mais à la fin on s'est mis d'accord que c'était elle ! C'est avec une grande émotion que je viens d'apprendre le décès de notre Ami et frère Michel. Au nom de tous mes collègues au département d'Écologie et Environnement nous présentons à sa famille les sincères condoléances et prions Dieu le Tout Puissant de l'accueillir dans son vaste Paradis".
Marie-Georges regrettera toujours "de n'avoir pas fait assez de sorties avec Michel pour qui les chants et les cris des oiseaux n'avaient aucun secret."
Jean-François se rappelle : - "avoir partagé cette vision fabuleuse d'un loup passant une crête enneigée dans le Parc National du Mercantour alors que nous étions en train de dénombrer des Lagopèdes sur ce même versant. Michel avait cette capacité d'écoute et de reconnaissance des chants d'oiseaux remarquable. Lorsqu'on faisait une sortie avec lui au petit matin, il avait déjà identifié une trentaine d'espèces avant même le lever du jour. Bon voyage au seul ornitho que j'ai connu qui faisait des observations les yeux rivés sur sol."
Evelyne : - "Personnellement il était à la fois "IL" de Gérard Lenorman, il est libre Max d'Hervé Cristiani, l'albatros de Baudelaire et le petit prince de Saint -Exupéry, il avait la magie de nous rendre meilleurs. Merci."
Eliane : - " je suis très triste. Nous avons partagé de bons moments, j'ai toujours admiré sa simplicité et sa gentillesse. Et bien sûr, j'ai profité de ses compétences ornithologiques et de son oreille infaillible. Il nous laisse un exemple, des témoignages de ses recherches et des œuvres effectuées depuis son plus jeune âge, et surtout une quantité phénoménale d'observations qui enrichissent la base de données de la LPO PACA. Il vivait pour les oiseaux, il est parti en migration ".
Pierre : - "Sur le barrage de Sainte Croix il m’a fait arrêter la voiture pour me montrer mon premier pipit spioncelle, une silhouette en contre-jour à une centaine de mètres, extraordinaire ! Lors de notre dernière rencontre à Manosque au domaine de La Thomassine, le 4 décembre, Michel a bien apprécié ma définition du chant du guêpier : « C’est ça, c’est bien ça » me disait-il en souriant. Aussi je souhaite qu’il soit bercé dans son au-delà, par le fluitiautrement dei manjo-mèu. Pèr nous leissa dins tei noto lei testimoni de toùtis aquélis oucelloun, gramerci Miquè."
Poème pour Michel par Pascal BARRE-LAZO :
Je me poserai délicatement sur ton épaule
Et mes ailes de papier
Décalqueront la couleur de tes yeux.
Affublé d’un baroque ramage
J’éviterai le soleil brûlant
Aussi bien que la pluie fatale ;
Au gré des vents
Je traverserai les océans
Et franchirai les grands cols,
Je me mêlerai aux oiseaux migrateurs,
Aux cerfs-volants
Et aux aéronefs.
La nuit, les mille feux des étoiles
Guideront mon fantastique voyage.
Un jour je me poserai
A nouveau sur ton épaule
Pour te conter l’histoire
D’un vol autour de la lune
Dans le reflet de tes yeux.