Suite aux requêtes de la LPO et de plusieurs associations, le Conseil d’Etat vient d’annuler partiellement l’arrêté ministériel du 3 juillet 2019 classant les « espèces susceptibles d’occasionner des dégâts » (ESOD, anciennement dénommés nuisibles) dans les départements français. Une victoire en demi-teinte pour la LPO qui compte bien obtenir des modifications substantielles au prochain arrêté en préparation.
La bonne nouvelle concerne le déclassement total du Putois d’Europe, inscrit depuis 2017 sur la liste rouge nationale des mammifères menacés établie par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et le Muséum national d’histoire naturelle (MNHN), et dont l’état de conservation est jugé alarmant. Cette espèce n'est pas chassable en région Provence-Alpes-Côte d'Azur et peu d'observations sont enregistrées chaque année sur faune-paca.org.
Vers la protection intégrale du Putois ?
Cette espèce de mustélidés décline en raison de la dégradation de son habitat (zones humides, bocages, haies), de la raréfaction de ses proies (lapins, amphibiens) et de sa destruction en tant qu’ « ESOD ». Alors qu'aucun dommage aux activités économiques (élevages, cultures) lié au putois n'y a été déclaré, il continue pourtant d’être considéré comme « nuisible » en Loire-Atlantique et dans le Pas-de-Calais, où près de 3000 spécimens ont été détruits annuellement entre 2014 et 2018. Après deux ans de procédure, l’arrêt du Conseil d’Etat interdit désormais de tuer des putois à l’échelle nationale au titre de la régulation des "ESOD". Il peut toutefois continuer d’être tiré en période de chasse..
La LPO espère que cette décision ouvrira la voie à l’adoption par le ministère de l’écologie d’une protection stricte de l’espèce, comme le réclament depuis 2017 la Société Française pour l’Etude et la Protection des Mammifères (SFEPM), le Conseil National de la Protection de la Nature (CNPN), le MNHN et l’UICN.
Bilan décevant pour les autres espèces
Outre le putois en Loire-Atlantique et dans le Pas-de-Calais, la LPO avait contesté pas moins de 56 classements « ESOD » dans 37 départements pour la Pie bavarde, le Geai des chênes, l'Etourneau sansonnet, la Corneille noire, le Corbeau freux, la Fouine, la Belette, la Martre des pins, et le Renard roux. Ce dernier est considéré comme espèce susceptible d’occasionner des dégâts dans tous les départements de Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Malgré des arguments étayés et circonstanciés, le Conseil d’Etat n’a prononcé au final qu’une poignée d’autres déclassements :
- La Martre des pins dans les départements de l’Ain, de la Moselle et des Hautes-Pyrénées
- La Pie bavarde dans les départements du Loiret et du Val d’Oise
- Le Renard roux dans les départements des Yvelines et de l'Essonne ainsi qu'une partie des Vosges et du Val d'Oise
- L'Etourneau sansonnet dans le département de la Marne
Beaucoup trop d’animaux continuent pourtant d’être indument tués en raison de leur classement ESOD, dont des centaines de milliers de renards. Dans un courrier adressé à la Ministre de l’écologie dès le mois de mai, la LPO a déjà demandé de se baser enfin sur des données scientifiques, techniques et économiques sérieuses avant de prendre un nouvel arrêté macabre fixant la liste des espèces gênantes à éliminer aveuglement.
Pour Allain Bougrain Dubourg : « Le Conseil d’Etat laisse malheureusement assez peu d’espoir quant à un véritable changement de paradigme dans la relation que nous entretenons avec la faune sauvage. L’homme ne doit plus s’arroger le droit de détruire des espèces vivantes au seul prétexte qu’elles pourraient nuire à ses intérêts. Qui plus est quand les dégâts sont loin d’être avérés, ni même comparés à tous les services rendus ».