Mardi 10 janvier 2023, l’Assemblée Nationale votera solennellement le projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (EnR). La LPO fait le point sur ce texte décisif pour l’avenir des transitions énergétique et écologique, avant ce vote qui sera suivi d’un ultime arbitrage entre sénateurs et députés en Commission mixte paritaire.
La LPO se réjouit tout d’abord des avancées obtenues dans l’hémicycle. Bien que traitées de manière trop souvent insatisfaisante, les questions de biodiversité sont enfin prises en compte dans le texte de loi. Un Observatoire des énergies renouvelables et de la biodiversité sera ainsi créé pour contribuer à l’amélioration des connaissances sur les impacts des EnR sur leur environnement et les moyens de les atténuer, même si son organisation et les ressources dont il disposera restent encore à préciser.
La planification des zones d’accélération des EnR prévue par le texte devrait également permettre de mieux prendre en compte les avis des gestionnaires d’espaces protégés ainsi que les objectifs de reconquête de la biodiversité, qui n’étaient même pas cités dans le projet d’origine !
Quelques victoires en demi-teinte
Le seuil à partir duquel les parkings existants devront être équipés d’ombrières solaires a finalement été abaissé à 1 500 m² au lieu des 2 500 m² d’abord envisagés par les députés en commissions parlementaires. Nous saluons ce pas en avant, même si nous demandions 500 m² tandis que les sénateurs avaient proposé 1000 m². Mieux vaut pourtant installer du photovoltaïque sur des surfaces déjà artificialisées qu’en plein champ !
La liste des bâtiments nouveaux devant être équipés de panneaux solaires a été étendue aux hôpitaux, équipements sportifs, récréatifs et de loisirs, aux bâtiments scolaires et universitaires, mais n’inclut pas le résidentiel collectif. Et tous les bâtiments à construire de moins de 500 m² ainsi que l’ensemble des bâtiments existants échappent totalement à l’obligation. Quel gâchis…
Les dispositions relatives au photovoltaïsme sur des terres agricoles et forestières, malgré une volonté nécessaire d’encadrement, ne permettront pas d’assurer le maintien des capacités nourricières des sols, ni une protection efficace de la biodiversité. Ce n’est pas acceptable.
Concernant l’éolien en mer, la mise en place d’outils de planification concertée et respectueuse des enjeux de biodiversité aurait pu constituer un réel progrès. Elle n’a pas été retenue : ce qui permettra d’envisager l’implantation des éoliennes dans des espaces protégées, tels que les Parcs naturels marins et les zones Natura 2000. La LPO y est formellement opposée.
Un important recul
Suite à un improbable imbroglio dans l’hémicycle et alors même qu’une solution de compromis allait être trouvée, l'article 4 a été réintégré. Il permet dorénavant que toute installation EnR, mais également de gaz et d’hydrogène bas-carbone, soit considérée comme une raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM). Ici aussi la démarche n’est pas acceptable : elle aggrave la version initiale du texte, et se révèle plus restrictive que les textes européens. En l'état, la loi autoriserait une micro installation EnR non connectée au réseau, ne contribuant que marginalement à la production d'électricité décarbonée et altérant des puits de carbone essentiels, à se prévaloir de cette RIIPM.
La LPO est totalement défavorable à une attribution aussi large et systématique de la RIIPM qui permet de bénéficier de dérogations aux obligations de conservation des espèces animales et végétales protégées et de leurs habitats. Elle demande que ce dispositif soit réservé aux projets contribuant de façon significative à la transition énergétique et à la sécurité d'approvisionnement du réseau. Cela suppose que des critères techniques minimum soient fixés pour chaque technologie, notamment en termes de puissance, et que soient également prises en compte leur localisation en dehors d’espaces protégés, et leurs modalités de déploiement.
Notre plaidoyer en faveur de la biodiversité a fini par être entendu par les parlementaires, au moins en partie. La LPO leur en est reconnaissante. Il reste toutefois des efforts à faire en commission mixte paritaire pour rehausser les ambitions de cette loi. Ne passons pas à côté d’un remarquable potentiel conjuguant climat et biodiversité !
Allain Bougrain DubourgPrésident de la LPO