Dans la continuité de 2021 et 2022, la France subi une sécheresse préoccupante cette année. Selon le BRGM, 75% des nappes phréatiques demeurent sous les niveaux normaux mensuels en France, avec de nombreux secteurs affichant des niveaux bas à très bas. De nombreuses régions présentent un risque avéré de sécheresse. Aussi, avant les fortes chaleurs de l'été, il est nécessaire d'économiser l'eau dans nos vies quotidienne, à commencer par le jardin.
Qu'est-ce que la sécheresse ?
La sécheresse définit l'état d'un environnement confronté à un manque d'eau significativement long et important pour qu'il ait des impacts sur la faune, la flore, les sols et les humains.
La multiplication des sécheresses traduit le changement climatique
L’augmentation des périodes de sécheresses est l’un des effets visibles du changement climatique. La sécheresse se caractérise par un déficit prolongé des précipitations entraînant un manque d’eau dans les sols et les nappes phréatiques, ainsi qu’ un déficit de débit des cours d’eau. Ce phénomène météorologique extrême touche l’ensemble du territoire et survient désormais de plus en plus tôt dans l’année. Notamment parce que les hivers, de plus en plus secs, ne garantissent plus le remplissage optimal des nappes phréatiques, mais aussi car nous connaissons des épisodes de canicules - épisodes de températures élevées, de jour comme de nuit, sur des périodes prolongées l’été.
En France, la sécheresse peut aujourd’hui apparaître en toute saison, parfois sur des périodes très courtes. Elle est désignée dans ce cas sous le nom de « sécheresse éclair ».
Les niveaux d'eau sont suivis à l'aide de mires limnimétriques dans les Réserves Naturelles de la LPO comme ici à Moëze-Oléron © Nicolas Macaire / LPO
Une sécheresse éclair dans la moitié nord
La sécheresse éclair est un phénomène météo qui a tendance à se multiplier depuis 1950 sous nos latitudes. Il s’agit d’une sécheresse qui intervient en dehors de la saison habituelle (l’été). Une sécheresse éclair se produit en 30 à 45 jours et même en 7 jours pour les plus extrêmes, là où une sécheresse classique intervient en plusieurs mois. L’impact d’un tel phénomène sur la végétation peut être important, y compris au jardin.
Au printemps, la végétation utilise immédiatement l’eau de pluie pour sa croissance et l’eau ne s’infiltre pas dans le sol. Depuis le 15 mai 2023, la moitié nord de la France subit ainsi une sécheresse éclair caractérisée par l’absence de pluie et un vent continu de nord-est qui assèche l’atmosphère.
La sécheresse impact la faune et la flore sauvages. La faune peine à trouver des points d’eau pour s’hydrater, l’assèchement des petites zones humides (flaques, petites mares…) fait disparaître la vie aquatique. Les plantes et les arbres peuvent présenter un état de stress hydrique si l’état de sécheresse persiste.
La grenouille agile (Rana dalmatina) comme beaucoup d'autres organismes aquatiques, souffre de l'assèchement des petits points d'eau lors des épisodes de sécheresse © Nicolas Macaire / LPO
Qu'attendre de cet été 2023 ?
Cette année, après un assèchement très précoce des sols dès la mi-janvier et jusqu’en février, les sols se sont ré-humidifiés grâce aux précipitations des mois de mars et avril. En mai, avec la reprise de la végétation, les pluies ne se sont pas infiltrées en profondeur dans le sol mais ont principalement servi la croissance des plantes (source : Météo France, 2023).
Météo France établit des scénarios à trois mois à l’aide de supercalculateurs (ordinateur capable d’effectuer rapidement un grand nombre de calculs). Les prévisions de l’organisation annoncent, pour les mois de juin, juillet et août 2023, un scénario probable d’un été plus chaud que la normale avec toutefois un signal moins affirmé que pour l’été 2022. En raison du déficit hydrique, certaines régions risquent de manquer d’eau cet été. La situation est déjà marquée en vigilance rouge pour tout le sud de la France.
Nous devons donc collectivement limiter l’usage de l’eau et économiser cette ressource vitale chaque fois que c’est possible tout en préservant les endroits « frais » du jardin pour la faune et la flore sauvages.
Lever de soleil en été / Pixabay
Economiser l'eau : les bonnes pratiques
Au jardin
L’idée principale est de limiter la consommation d’eau, et surtout de ne pas arroser aux heures les plus chaudes entre 10h00 et 17h00, car l’eau s’évapore sans avoir le temps de pénétrer dans le sol. Il existe différentes techniques d’économie d’eau et d’aménagements du jardin, et nous vous proposons ici quelques pistes :
- Installer un collecteur d’eau de pluie à votre gouttière reliée à une citerne. Un collecteur peut vous offrir jusqu’à 70 m3 d’eau gratuite pour une toiture de 100 m2 (source : ADEME, 2023).
- Apporter de l’eau au pied des jeunes arbustes : à l’aide d’un arrosoir ou d’un tuyau d’arrosage, et en formant une cuvette au pied des jeunes plants, vous pouvez apporter de l’eau provenant d’une citerne de récupération d’eau de pluie. Cet arrosage « ciblé » évite de gaspiller l’eau.
- Disposer un système d’arrosage goutte à goutte : économe en eau, ce système peut être disposé dans les massifs fleuris, au pied des arbres. Le système goutte à goutte, ou micro-irrigation, fonctionne avec un tuyau en surface ou enterré, diffusant des gouttes d’eau à travers des trous minuscules. Le goutte à goutte permet d’économiser jusqu’à 50% d’eau (source : ADEME, 2023)
- Pratiquer le paillage au pied des plantations : le paillage consiste à recouvrir le sol au pied des jeunes plants avec de la paille, de l’herbe fauchée, des copeaux de bois… Le couvert végétal ainsi formé, appelé paillis, permet de préserver l’humidité dans le sol. Le paillage est une technique à combiner avec les méthodes d’arrosage économe qui sont décrites ici !
- Disposer un système d’oyas: il s’agit d’un système écologique et ancestral d’arrosage : des pots en terre cuite micro-poreuse libèrent de l’eau par capillarité. Un pot de fleur enterré peut jouer le rôle de l’oya ! Voir notre Tuto Refuges « Comment fabriquer des oyas avec des pots en terre cuite ? ».
- Adapter son jardin aux changements climatiques : choisir des plantes indigènes supportant la chaleur et le soleil comme les espèces originaires du bassin méditerranéen (chêne vert, arbousier, argousier, figuier, lavande, romarin…). Ces plantes supportent aujourd’hui d’être plantées en dehors du pourtour méditerranéen en raison des hivers plus doux, tout en étant également favorables à la
L'arrosoir permet de réduire la consommation d'eau au jardin / Pixabay
Pour protéger la faune et la flore
La plupart des animaux et des plantes ne peuvent pas vivre en l’absence d’eau. Certains insectes se contentent d’une goutte de rosée alors que les oiseaux ou les petits mammifères doivent trouver un petit point d’eau pour la toilette ou s’hydrater.
- Créer une petite mare naturelle pour la faune : de nombreux animaux viendront y chercher de l’eau et la mare constitue un îlot de fraîcheur au jardin. Pour se maintenir en eau en période de sécheresse, une petite mare de jardin (1 à 2 m2) devrait au moins avoir 80 cm à 1 mètre de profondeur. Si vous constatez un niveau trop bas, vous pouvez ajuster le niveau avec de l’eau de pluie récupérée depuis une citerne. Attention, l’eau du robinet ne convient pas, car elle est traitée et le chlore empêche les micro-organismes de se développer. Voir le geste Refuges "Je récupère l'eau et dispose des points d'eau pour la faune".
- Laisser des îlots d’herbes hautes: les herbes hautes permettent de maintenir un degré d’humidité suffisant au niveau du sol empêchant qu’il s’assèche et se fissure en cas de canicule. Ce sont des zones refuges qui servent de cachettes et de lieu de vie à de nombreuses espèces : papillons, sauterelles, criquets, petits mammifères...
- Préserver les gros arbres : l’évapotranspiration et l’ombre procurées par le feuillage apportent de la fraîcheur au jardin.
Moineaux domestiques (Passer domesticus) au bain © Alain Boullah
A la maison : repenser l’usage de l’eau
En fonction de votre lieu de résidence, il vous faut ou faudra respecter les mesures mises place par les communes et les préfectures visant à limiter l’usage de l’eau en période de sécheresse : non remplissage des piscines, non arrosage des pelouses et jardins, limiter le lavage des voitures, prendre une douche plutôt qu’un bain… Voici quelques pistes d’actions à la maison :
- Recycler l’eau de lavage des légumes et des fruits pour arroser les bacs et les massifs.
- Récupérer l’eau de chauffe de votre douche dans un seau pour arroser plantes intérieures ou extérieures.
- Pour laver votre voiture : Une simple bouteille d’eau de 1,5 litres à laquelle vous ajoutez 4 gouttes de liquide vaisselle ou de lessive permet de nettoyer sa voiture avec un chiffon humide ou une éponge.
- Repérer les fuites : elles peuvent constituer une grande source de gaspillage. Comment faire ? Juste avant d’aller vous coucher, relevez votre compteur d’eau. Si le compte a évolué pendant votre sommeil, c’est qu’une fuite se cache quelque part. Et sachez qu’elles sont loin d’être neutres : un robinet qui goutte, c’est 5 litres/heure gaspillés (soit 120 litres/jour), une chasse d’eau qui fuit, plus de 600 litres/jour (soit la consommation quotidienne d’une famille de 4 personnes) (source : ADEME, 2023)
Economiser l’eau, vous l’aurez compris, fait désormais partie des enjeux environnementaux et citoyens de nos régions tempérées. Dans un contexte où le climat change et les ressources naturelles s’amenuisent, il est nécessaire de faire sa part pour préserver l’eau, une substance chimique indispensable à la vie sur Terre.