Du 27 mai au 19 juin 2019, les ministères de la Transition écologique et solidaire et de l’Agriculture lancent une consultation publique ouverte à tous les citoyens sur un projet d’arrêté « portant expérimentation de diverses dispositions en matière de dérogations aux interdictions de destruction pouvant être accordées par les préfets concernant le loup (Canis lupus) ».
Au lendemain même des élections européennes au cours desquelles il a tenté de mettre en avant ses ambitions en matière d’écologie et de protection de la biodiversité, le gouvernement s’apprête donc à augmenter le nombre de loups qu’il autorise à tuer en France au cours de l’année 2019..
La LPO vous propose de participer à cette consultation publique et de s’opposer à cet arrêté en demandant à l’Etat de privilégier la protection des troupeaux et de n’avoir recours aux tirs létaux que de manière exceptionnelle. Seules les réponses argumentées étant prises en compte, nous vous recommandons de bien lire l’article ci-dessous et vous documenter afin de vous faire un avis avant de remplir le formulaire de la consultation.
Lien vers la consultation publique
Pour la première fois depuis son retour détecté dans le Parc du Mercantour en 1992, le nombre total de loups en France venait tout juste d’atteindre 500. En prévoyant de passer le plafond de prélèvement de 10 à 17% de la population totale estimée, avec la possibilité d’aller jusqu’à 19%, c’est donc potentiellement 95 individus de cette espèce protégée (contre 51 en 2018) qui seraient ainsi condamnés à mort sous la pression des organismes professionnels agricoles et des fédérations de chasse au détriment d’une véritable politique de cohabitation entre le loup et les activités humaines.
L'État est un loup pour le loup
Dans son avis défavorable à ce projet, Le Conseil National de Protection de la Nature (CNPN) déplore que l’Administration ne semble plus avoir aucun objectif en termes de développement et de croissance de la population lupine et qu’il n’y ait aucune remise en cause des mauvaises pratiques pastorales pourtant connues. L’Etat met par contre en place une véritable régulation de long terme de la population de loups qui est en contradiction avec le droit communautaire et national, et la biologie de la conservation. En d’autres termes, la stratégie déployée vise à maintenir et limiter autour de 500 le nombre de loups présents dans l’hexagone, soit le seuil de viabilité démographique basé sur certaines expertises. Or ce chiffre ne tient pas compte des individus non reproducteurs. L’effectif minimal à atteindre serait plutôt de l’ordre de 2500 à 5000 car si l’espèce est aujourd’hui signalée sur une bonne partie du territoire, elle ne se reproduit que dans quelques régions de montagne (Alpes, Vosges, Massif Central).
Le CNPN rappelle également son inquiétude sur la capacité de l’Administration à vérifier sur le terrain la mise en place effective des dispositifs de protection : gardiennage, chiens de protection et regroupement nocturne, tandis que l’effarouchement n’est plus une condition préalable au déclenchement des tirs. Comment expliquer que ce soit dans les départements les plus anciennement colonisés par le loup et où les mesures de protection devraient être maintenant mises en œuvre efficacement, à quelques rares exceptions près, que les autorisations de tirs et le nombre de loups abattus sont les plus importants ?
Une stratégie inefficace
Une note technique conjointe du MNHN et de l’ONCFS souligne que les données disponibles indiquent que le volume de dommages constatés dans les élevages n’est pas proportionnel au nombre de tirs dérogatoires et qu’agir sur la croissance globale de la population ne constitue donc pas la solution pour contenir, voire réduire les dégâts. A l’inverse, la chasse déstructure et éparpille les meutes, avec comme conséquence une augmentation des attaques sur les troupeaux.
L’abattage de loups, qui ne devrait être que la solution de dernier recours, est devenue en France la norme gouvernementale. Chez nos voisins espagnols et italiens, l’expansion du loup est pourtant considérée comme une bonne nouvelle car il est un allié incontournable des forestiers qui trouvent là un moyen naturel de diminuer les dégâts des cervidés. C’est en outre un atout non négligeable pour développer l’éco-tourisme. Rappelons également que les chasseurs prélèvent chaque année en France plus de 50,000 cerfs, un demi-million de chevreuils et encore plus de sangliers, autant de proies qui ne sont plus disponibles pour leur prédateur naturel qu’est le loup.